Réforme de l'assurance maladie
La loi portant réforme de l'assurance maladie a été définitivement adoptée le 30 juillet 2004. Parmi les principales mesures, notons :
l'élargissement de l'assiette de la CSG et de la CRDS, le relèvement du taux de CSG pour certains revenus, la création d'une contribution additionnelle à la CSSS, le renforcement de la lutte contre le travail dissimulé, la responsabilisation des acteurs de l’assurance maladie et le renforcement du contrôle médical des arrêts de travail.
Loi 2004-810 du 13 août 2004, JO du 17, p. 14598
Les recettes de l'assurance maladie sont augmentées grâce à l'élargissement
de l'assiette de la CSG et de la CRDS, à l'augmentation de la CSG sur certains
revenus ainsi qu'à la création d'une nouvelle contribution additionnelle à la
contribution sociale de solidarité des sociétés.
Augmentation de l'assiette de la CSG et de la CRDS
À compter du 1er janvier 2005, l'abattement d'assiette pour
frais professionnels applicable à la contribution sociale généralisée (CSG)
et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) sur
les revenus d'activité et les allocations chômage sera réduit de 5 % à 3 % (art.
72, I ). À cette date, ces deux contributions seront donc calculées sur 97 % de
la base CSG/CRDS (contre 95 % actuellement).
Par ailleurs, la CRDS continuera d'être perçue jusqu'à l'apurement
de la dette sociale (art. 76). Celle-ci avait été initialement créée à titre
temporaire jusqu'en 2014.
Relèvement du taux de la CSG sur les pensions de
retraite et d'invalidité
Le taux de la CSG sur les pensions de retraite, d'invalidité
et les allocations de préretraite passera de 6,2 % à 6,6 % (art. 72, II ).
En revanche, le taux de la CSG sur les revenus d'activité (fixé
à 7,5 %) et celui applicable aux allocations chômage et aux indemnités journalières
de sécurité sociale (fixé à 6,2 %) demeurent inchangés.
Le taux de la CSG est porté à 8,2 % (au lieu de 7,5 %) (art.
72-II-2°) :
- sur les revenus du patrimoine (c. séc. soc. art. L. 136-6 ; CGI art. 1600-0 C). La
majoration s'applique dès l'imposition des revenus de 2004 ;
- sur les revenus de placements soumis au prélèvement libératoire
(c. séc. soc. art. L. 136-7-I ; CGI art. 1600-0 D-I). La majoration s'applique
aux produits pour lesquels le prélèvement est opéré à compter du 1er janvier 2005
;
- sur les plus-values immobilières, sur biens meubles et sur
titres de sociétés à prépondérance immobilière (CGI art. 150 U à 150 UB ; c. séc.
soc. art. L. 136-7-I). La majoration s'applique aux cessions intervenues à compter
du 1er janvier 2005 ;
- sur les revenus de l'épargne (c. séc. soc. art. L. 136-7-II),
pour la part de ces produits acquise et, le cas échéant, constatée, à compter
du 1er janvier 2005.
Assiette et taux
Une contribution additionnelle à la contribution sociale de
solidarité sur les sociétés est créée (art. 75).
Fixée à un taux de 0,03 %, cette nouvelle contribution a la
même assiette que la contribution sociale de solidarité des sociétés (CSSS).
Elle sera calculée sur le chiffre d'affaires hors taxes déclaré au titre de la
CSSS due à compter du 1er janvier 2005.
Remarque : Cette contribution additionnelle
sera affectée aux ressources du régime d'assurance maladie des travailleurs
salariés.
Les pouvoirs de l'agent habilité à effectuer les contrôles
sont étendus, notamment dans le cadre des auditions. La responsabilité du
donneur d'ordre en cas de sous-traitance est quant à elle
renforcée : il devra s'assurer que le sous-traitant respecte ses obligations
tous les six mois jusqu'à la fin de l'exécution du contrat.
La liste des personnes susceptibles d'être auditionnées par
ces agents est étendue aux personnes ayant été rémunérées ou présumées être ou
avoir été rémunérées. Ces agents ne pouvaient jusqu'à présent entendre que « toute
personne rémunérée ».
Enfin, les agents peuvent demander aux employeurs, aux
travailleurs indépendants, aux personnes occupées dans l'entreprise ou sur le
lieu de travail ainsi qu'à toute personne dont ils sont amenés à recueillir les
déclarations dans l'exercice de leur mission de justifier de leur identité et
de leur adresse (art. 71, II, 3°).
Toute personne qui conclut un contrat dont l'objet porte sur
une obligation d'un montant au moins égal à 3 000 € en vue de l'exécution d'un
travail, de la fourniture d'une prestation de services ou de l'accomplissement
d'un acte de commerce, doit s'assurer que son cocontractant s'acquitte de ses
obligations fiscales et sociales (immatriculation, déclarations aux organismes
sociaux et fiscaux, remise des bulletins de paie, déclaration préalable à l'embauche).
À défaut, elle est tenue solidairement avec celui qui a fait
l'objet d'un procès-verbal pour délit de travail dissimulé au paiement des impôts,
des taxes, des cotisations obligatoires, des majorations et pénalités dues au
Trésor ou aux organismes de protection sociale ainsi qu'au paiement des rémunérations,
indemnités et charges dues pour l'emploi de salariés dissimulés (art. 71, III).
Afin de maîtriser les dépenses de
santé, la loi responsabilise les acteurs de l'assurance maladie (patient,
professionnel de santé et employeur) en créant une participation financière à la
charge de l'assuré, une pénalité financière en cas de fraude et en renforçant
le contrôle médical des arrêts de travail.
Une participation forfaitaire à la charge de l'assuré est prévue
pour chaque acte ou pour chaque consultation pris en charge par l'assurance
maladie et réalisé par un médecin, en ville, dans un établissement ou un centre
de santé (à l'exclusion des actes et consultations réalisés au cours d'une
hospitalisation) ainsi que pour tout acte de biologie médicale (art. 20 ; c. séc.
soc. art. L. 322-2 modifié).
Cette participation, d'une valeur fixée ultérieurement par décret
(en principe 1 €), concerne tous les assurés (assurés malades, accidentés du
travail et victimes de maladie professionnelle), à l'exclusion des mineurs à charge,
des bénéficiaires de la couverture maladie universelle (CMU), y compris les bénéficiaires
de la CMU complémentaire (art. 20 ; c. séc. soc. art. L. 322-4 modifié), et des
femmes prises en charge par l'assurance maternité (puisqu'elles
sont exonérées du ticket modérateur pour les soins et arrêts de travail liés à leur
état de grossesse).
L'efficacité de cette nouvelle mesure passe nécessairement
par la non-prise en charge du forfait par les
organismes de prévoyance complémentaire.
Ainsi, pour inciter les organismes de prévoyance complémentaire
à refuser de prendre en charge cette participation, la loi prévoit que les
primes et cotisations finançant des garanties qui couvrent cette franchise sont
réintégrées dans l'assiette de cotisations de sécurité sociale (art. 57 ; c. séc.
soc. art. L. 242-1). Ces mêmes primes et cotisations sont soumises à l'impôt
sur le revenu (art. 57 ; CGI art. 83 1° quater).
Remarque : En outre, ces organismes devront
impérativement prévoir, dans le cahier des charges annexé au contrat d'assurance,
l'exclusion de la prise en charge de ce forfait, sous peine de se voir priver
du bénéfice de l'exonération de la taxe sur les conventions d'assurance (art. 57
; CGI art. 995-15° et 16° modifié).
Le directeur de l'organisme local d'assurance maladie qui
constate un ou plusieurs manquements aux règles régissant l'assurance maladie
par les professionnels de santé, les établissements de santé, les employeurs ou
les assurés peut prononcer à leur encontre une pénalité
financière, après avis d'une commission constituée au sein du conseil de
l'organisme d'assurance maladie (art. 23 ; c. séc. soc. art. L. 162-1-14 modifié).
Conformément au principe de proportionnalité des peines, le
montant de la pénalité est déterminé en fonction de la gravité des faits, dans
la limite de deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale (soit 4952 € pour
2004). Ce montant est doublé en cas de récidive. Le barème des pénalités sera
fixé par décret.
Une majoration de 10 % est applicable aux pénalités qui
n'ont pas été réglées aux dates d'exigibilité mentionnées dans la mise en demeure.
Renforcement du contrôle médical des arrêts de travail
Les pouvoirs du service du contrôle médical de la sécurité sociale
sont renforcés.
Le service du contrôle médical peut désormais s'assurer de
l'identité du patient à l'occasion des examens individuels qu'il réalise, en
demandant à la personne contrôlée de présenter sa carte nationale d'identité ou
tout autre document officiel comportant sa photographie (art. 27 ; c. séc. soc.
art. L. 315-1, IV bis modifié).
Il est en droit d'évaluer l'intérêt thérapeutique des soins
dispensés à l'assuré, non seulement au vu des dépenses présentées au
remboursement mais, également, au vu de la fréquence des prescriptions d'arrêts
de travail (art. 27 ; c. séc. soc. art. L. 315-2-1 modifié).
Rappel sur
les obligations de l'assuré en arrêt de travail
Les obligations
à la charge de l'assuré sont désormais inscrites dans le code de la sécurité sociale
(art. 27 ; c. séc. soc. art. L. 323-6 modifié).
Rappelons que
le service de l'indemnité journalière est subordonné à l'obligation pour le bénéficiaire
d'observer les prescriptions du praticien, de se soumettre aux contrôles
organisés par le service médical de la sécurité sociale, de respecter les
heures de sortie autorisées par le praticien (qui ne peuvent excéder 3 heures
consécutives par jour) et de s'abstenir de toute activité non autorisée.
Par ailleurs,
la prolongation de l'arrêt de travail doit désormais être prescrite par le médecin
prescripteur de l'arrêt initial ou par le médecin traitant (sauf impossibilité dûment
justifiée par l'assuré et à l'exception des cas définis par décret), sous peine
d'interruption de l'indemnisation (art. 28 ; c. séc. soc. art. L. 162-4-4
modifié).
Impact de la suspension des indemnités journalières
pour l'employeur
La CPAM qui décide de suspendre le versement des indemnités
journalières doit, non seulement, en informer l'assuré, mais également son
employeur.
Cette nouvelle information peut conduire l'employeur, le cas
échéant, à suspendre également l'indemnisation complémentaire à laquelle il
peut être tenu par la loi ou en vertu de dispositions conventionnelles .
S'il lui est strictement interdit de consulter le dossier médical
personnel du salarié, le médecin du travail peut désormais préparer et étudier
les modalités et conditions de reprise du travail d'un salarié absent depuis
plus de trois mois avant la visite de reprise d'activité obligatoire.
Au plus tard le 1er juillet 2007, chaque bénéficiaire de
l'assurance maladie disposera d'un dossier médical personnel constitué d'informations
permettant le suivi des actes et prestations de soins (art. 3).
L'accès à ce dossier médical ne peut être exigé que par les
professionnels de santé, exerçant en ville ou en établissement de santé, quel
que soit leur mode d'exercice, à l'occasion de chaque acte ou consultation (art.
3 ; c. séc. soc. art. L. 161-36-1 modifié).
Remarque : Le
niveau de prise en charge des actes et prestations de soins par l'assurance
maladie est subordonné à l'autorisation que donne le patient, à chaque
consultation ou hospitalisation, aux professionnels de santé auxquels il a
recours, d'accéder à son dossier médical personnel et de le compléter. À cette
fin, le professionnel de santé doit indiquer, lors de l'établissement des
documents nécessaires au remboursement ou à la prise en charge (feuille de
soins), s'il a été en mesure d'accéder au dossier (art. 3 ; c. séc. soc. art. L.
161-36-2 modifié).
En dehors du suivi médicalisé, le dossier médical personnel
de l'assuré n'est pas accessible même avec son accord exprès (art. 3 ; c. séc. soc.
art. L. 161-36-3 modifié). Plus particulièrement, le
dossier médical personnel n'est pas accessible dans le cadre de la médecine du
travail.
Par voie de conséquence, l'accès
au dossier ne peut être exigé par l'employeur, ni préalablement à la conclusion
d'un contrat de travail, ni à aucun moment ou à aucune occasion de son
application.
Remarque : La même interdiction est faite lors
de la conclusion d'un contrat de complémentaire santé et à l'occasion de la
conclusion de tout autre contrat exigeant l'évaluation de l'état de santé d'une
des parties.
Sanctions
Tout manquement aux nouvelles dispositions relatives au
dossier médical personnel constitue un délit passible d'une peine
d'emprisonnement d'un an et de 15 000 € d'amende (c. pén.
art. 226-13).
Référence du dossier : FH 3049