Travail illégal : la loi « immigration » durcit la réglementation

La loi relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité a été publiée au Journal officiel, après validation de l'essentiel de ses dispositions par le Conseil constitutionnel. Ce texte accentue notamment la pression sur les donneurs d'ordre et les maîtres d'ouvrage, afin que ceux-ci s'assurent que leurs cocontractants n'emploient pas d'étrangers sans titre de travail. Loi 2011-672 du 16 juin 2011, JO du 17, p. 10290

 

Lutte contre l'emploi d'étrangers sans titre de travail

Il est interdit d'employer, directement ou indirectement, un étranger qui n'a pas de titre de travail (c. trav. art. L. 8251-1). L'entreprise en infraction s'expose à des sanctions civiles et pénales.

À l'avenir, il sera aussi interdit de recourir sciemment aux services de l'employeur d'un étranger sans titre de travail (loi art. 75-I ; c. trav. art. L. 8251-2 nouveau).

Cette mesure se traduit par une responsabilité accrue du donneur d'ordre.

Le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage qui conclut un contrat pour un montant d'au moins 3 000 € doit s'assurer que son cocontractant respecte ses obligations en matière d'emploi de salariés étrangers. À cette fin, il se fait remettre par ce dernier la liste nominative des travailleurs étrangers employés et soumis à autorisation de travail (c. trav. art. L. 8254-1 et D. 8254-2).

Cette obligation de vérification se doublera d'une obligation d'injonction. Ainsi, dès l'instant où le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage sera informé que son cocontractant ou son sous-traitant direct ou indirect emploie un étranger sans titre, il devra lui enjoindre de faire cesser cette situation (loi art. 80 ; c. trav. art. L. 8254-2-1 nouveau).

 

Cette obligation de mise en demeure ne s'appliquera que si l'information est donnée par un agent de contrôle, un syndicat de salariés, un syndicat ou une association d'employeurs ou une institution représentative du personnel.

L'employeur de l'étranger sans titre de travail devra informer son donneur d'ordre des suites données à cette injonction. S'il ne prend aucune mesure, le donneur d'ordre pourra résilier le contrat aux frais et risques du cocontractant.

Le donneur d'ordre qui ne respecte pas cette procédure sera solidairement responsable, avec son cocontractant, des sommes dues au titre de l'emploi d'un étranger sans titre de travail (voir § 4-6).

Solidarité financière du donneur d'ordre

En cas d'infraction pour emploi d'étrangers sans titre, le donneur d'ordre est solidairement responsable de son cocontractant.Jusqu'à présent, cette solidarité se limitait essentiellement aux sanctions administratives. Le donneur d'ordre pouvait donc être amené à payer :

- la contribution spéciale due à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) en cas d'emploi d'un étranger sans titre de travail, qui s'élève à 5 000 fois le taux horaire du Smic (c. trav. art. L. 8253-1) ;

- lorsque l'étranger est de surcroît en situation irrégulière, la contribution forfaitaire aux frais de réacheminement (CESEDA art. L. 626-1).

À l'avenir, il pourra aussi se voir réclamer les sommes dues au travailleur étranger, soit (loi art. 78 ; c. trav. art. L. 8254-2 modifié) :

- les salaires et accessoires qui auraient dû lui être versés pendant la période d'emploi illicite;

- le cas échéant, les frais d'envoi de ces rémunérations ;

- l'indemnité forfaitaire pour emploi d'un étranger sans titre de travail .

Sanctions pénales

Le fait d'employer, directement ou par personne interposée, un étranger sans titre de travail est puni d'une peine d'emprisonnement de 5 ans et d'une amende de 15 000 €.

Dans la logique de la nouvelle réglementation, qui vise à « responsabiliser toute la chaîne de sous-traitance » (rapport Sénat n° 231, p. 182), ces sanctions s'appliqueront aussi bien à l'employeur du salarié étranger qu'à celui qui a sciemment eu recours à ses services (loi art. 81 ; c. trav. art. L. 8256-2 modifié).

Titres de séjour : création de la « carte bleue européenne »

Un nouveau titre de séjour temporaire valant aussi autorisation de travail est créé : il s'agit de la « carte bleue européenne ». Ce titre s'adresse aux travailleurs immigrés hautement qualifiés.

La carte bleue européenne entrera en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant le jour de publication de la loi, soit le 30 septembre 2011 (loi art. 111).